Le budget de la "Sécu" de retour à l'Assemblée, avec une issue très incertaine
Un acte 2 décisif: les députés planchent à nouveau à partir de mardi sur le projet de budget de la Sécurité sociale, à l'avenir très incertain, avec encore des compromis à trouver à gauche et une coalition gouvernementale qui part divisée.
Retraites, franchises, déficit à contenir... Les sujets explosifs ne manquent pas, tous facteurs d'une équation difficile pour rassembler des voix de groupes aux positions souvent opposées.
Une adoption du texte mardi prochain serait une victoire majeure pour le gouvernement de Sébastien Lecornu, qui, contraint par son absence de majorité, place le Parlement au centre de la construction budgétaire.
Mais un rejet serait un désaveu cinglant de la méthode gouvernementale.
Pour convaincre certains groupes, la porte-parole du gouvernement, Maud Bregeon, a fait valoir que voter le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2026 n''équivaudrait pas à "un quelconque soutien au gouvernement".
Les députés repartent de la copie du Sénat, qui a profondément remanié le projet de loi en écartant la suspension de la réforme des retraites, concédée par le gouvernement en échange de la non-censure du PS.
Le moment est crucial car si le dernier mot est donné à l'Assemblée nationale après un nouveau passage au Sénat, la copie finale ne pourra que très peu différer de celle écrite par les députés cette semaine.
L'examen du texte devrait commencer en fin d'après-midi par une motion de rejet préalable des Insoumis, a priori vouée à l'échec. Le Premier ministre, présent, pourrait prendre la parole.
- "Ingénieurs du chaos" -
Face au rejet attendu du texte par le RN, ses alliés et LFI qui regroupent 210 députés, l'adoption du projet de loi "ne repose pas uniquement sur les groupes qui soutiennent le gouvernement et sur le Parti socialiste", a affirmé Mme Bregeon.
Une manière d'encourager les écologistes et les communistes à s'abstenir, alors qu'une partie du camp gouvernemental pourrait faire défection ?
En l'état, "on ne peut pas voter pour", a jugé Edouard Philippe devant le groupe Horizons, qui oscille entre vote contre et abstention.
Une "petite bombe" selon un cadre Renaissance. "Si Horizons ne vote pas pour, c'est mort en fait".
Le groupe LR n'a pas encore arrêté de position, et est divisé, selon plusieurs sources internes, mais le président des Républicains, Bruno Retailleau, est très opposé à la suspension de la réforme des retraites.
Le Premier secrétaire du PS, Olivier Faure, s'est emporté devant la presse contre ces prises de positions: "si Horizons, si Edouard Philippe et si Bruno Retailleau considèrent qu'il n'y a pas assez d'ingénieurs du chaos, qu'ils le disent, et s'ils veulent se rajouter à la liste, qu'ils le disent aussi", a-t-il dit, les accusant de se comporter comme "les pires démagogues" et de travailler "uniquement pour leur candidature à l'élection présidentielle".
Les débats pourraient se tendre, dès mardi soir ou mercredi, sur la question de l'augmentation de la CSG du capital, obtenue de haute lutte en première lecture par le PS, et dont LR ne veut pas en entendre parler.
Autre point brûlant: les franchises médicales, reste à charge payé par les patients par exemple sur les médicaments, que le gouvernement entend doubler par décret.
"Il doit renoncer" à cette "mesure injuste", a martelé le groupe écologiste, dont le vote pourrait être décisif.
Les députés devraient ré-indexer sur l'inflation les minimas sociaux et pensions de retraite. Et suspendre de nouveau la réforme des retraites.
Pour le rapporteur général Thibault Bazin (LR), "si on évite les irritants, et qu'on n'en crée pas de nouveau (...) on peut avoir un chemin".
Mais cela impliquera, selon lui, un déficit de la "Sécu" plus important que 20 milliards d'euros, limite fixée par le gouvernement, alors que l'Assemblée nationale en première lecture le portait à 24 milliards.
- "Qu'un chemin, le compromis" -
Le gouvernement, qui alerte sur un déficit de la Sécurité sociale approchant "30 milliards" d'euros en l'absence de budget, pourrait-il ressusciter le 49.3 pour passer l'obstacle ?
Certains députés le souhaitent, estimant plus facile pour les socialistes, voire pour Horizons et LR, de ne pas censurer le gouvernement que de voter ce compromis. "La meilleure solution reste le 49.3 car personne ne veut assumer ce budget", a encore estimé le président du groupe MoDem, Marc Fesneau.
Une piste écartée par l'entourage de M. Lecornu: "Il n'y a qu'un chemin, le compromis parlementaire".
Pour M. Faure, qui avait demandé au Premier ministre d'y renoncer, "le 49.3, c'est la politique pour les paresseux, pour tous ceux qui ne veulent pas prendre leurs responsabilités".
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S. Alves--JDB