
"Le temps de la paix est venu": la France reconnaît "l'Etat de Palestine" à l'ONU

Emmanuel Macron a reconnu lundi "l'Etat de Palestine" au nom de la France depuis la tribune de l'ONU, tentant de renforcer la pression sur Israël en faveur de "la paix", dans le cadre d'un mouvement historique mais à la portée encore avant tout symbolique.
"La France reconnaît aujourd'hui l'Etat de Palestine", "pour la paix entre le peuple israélien et le peuple palestinien", a déclaré solennellement sous les applaudissements le président français, à l'ouverture de la grand-messe annuelle des Nations unies à New York, qui sera dominée par la guerre à Gaza.
"Nous sommes là car le temps est venu. Le temps est venu de libérer les 48 otages détenus par le Hamas. Le temps est venu d'arrêter la guerre, les bombardements à Gaza, les massacres et les populations en fuite. Le temps est venu car l'urgence est partout. Le temps de la paix est venu, car nous sommes à quelques instants de ne plus pouvoir la saisir", a-t-il martelé.
Comme Israël, qui dénonce cette décision déjà formalisée dimanche par le Royaume-Uni, le Canada, l'Australie et le Portugal et qui devaient être imités par d'autres pays lundi à l'ONU, les Etats-Unis ont fustigé la reconnaissance.
Principal allié du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, Donald Trump "pense que c'est une récompense pour le Hamas" de reconnaître l'Etat de Palestine, a dit lundi sa porte-parole Karoline Leavitt.
Emmanuel Macron a été à l'initiative d'un sommet, coprésidé avec l'Arabie saoudite, sur l'avenir de la solution à deux Etats, aboutissement de plusieurs mois d'intense travail diplomatique pour rallier un maximum de pays et tenter de forger un plan de paix.
Il a permis l'adoption à l'écrasante majorité de l'Assemblée générale de l'ONU d'un texte soutenant un futur Etat palestinien mais qui exclut sans équivoque le mouvement islamiste Hamas. Une condition exigée par de nombreux pays occidentaux.
Cela porte désormais à au moins 146, sur 193 Etats membres de l'ONU, le nombre de pays ayant franchi le pas, selon le décompte de l'AFP. Cela ne change pas le statut d'observateur des Palestiniens à l'ONU, dont l'adhésion pleine et entière a été bloquée par les Etats-Unis.
Plusieurs autres pays devraient rejoindre le mouvement lundi avec Andorre, la Belgique, le Luxembourg, Malte, Monaco et Saint-Marin, selon Emmanuel Emmanuel Macron.
L'Allemagne de son côté ne l'envisage pas à court terme. "La reconnaissance d'un Etat palestinien se situe plutôt à la fin du processus. Mais un tel processus doit commencer dès maintenant", a déclaré le ministre allemand des Affaires étrangères, Johann Wadephul.
- "Effacement" des Palestiniens -
L'Italie est sur cette même position, mais des dizaines de milliers de personnes ont manifesté lundi à travers toute la péninsule pour "dénoncer le génocide à Gaza", lors d'une journée de mobilisation, émaillée de heurts à Milan.
En France, la reconnaissance a été salué par près d'une centaines de villes dirigées par la gauche qui ont hissé le drapeau palestinien au fronton de leur mairie, malgré la ferme opposition du ministre de l'Intérieur.
Le président palestinien Mahmoud Abbas, qui doit s'exprimer par vidéo après avoir été privé de visa par les Etats-Unis, a salué les nouvelles reconnaissances comme "un pas important et nécessaire vers la concrétisation d'une paix juste et durable".
Mais certains diplomates craignent des représailles israéliennes.
Benjamin Netanyahu a répété dimanche qu'il n'y aurait pas d'Etat palestinien et a menacé d'étendre la colonisation en Cisjordanie, tandis que deux ministres israéliens d'extrême droite, Itamar Ben Gvir et Bezalel Smotrich, appelaient même à l'annexion de ce territoire palestinien occupé.
Mais "nous ne devons pas nous sentir intimidés par le risque de représailles, parce que, quoi que nous fassions, ces actions vont continuer", a insisté le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres dans un entretien à l'AFP, en référence à la guerre à Gaza et à "l'annexion insidieuse de la Cisjordanie".
Dans ce contexte, le discours du Premier ministre israélien vendredi à l'Assemblée générale de l'ONU est très attendu, tout comme celui de Donald Trump mardi.
Pour Max Rodenbeck, de l'International Crisis Group, tout effort diplomatique pour soutenir les droits des Palestiniens est "bienvenu", mais sans "mesures concrètes", ces reconnaissances risquent de "distraire de la réalité, qui est l'effacement accéléré de la vie des Palestiniens sur leur terre natale".
L'attaque du 7 octobre 2023 contre Israël par le Hamas a entraîné la mort de 1.219 personnes du côté israélien, en majorité des civils, selon des données officielles.
Selon le ministère de la Santé du gouvernement du Hamas à Gaza, les représailles israéliennes ont coûté la vie à 65.062 Palestiniens, en majorité des civils, dans la bande de Gaza, où le Hamas a pris le pouvoir en 2007.
H. Garcia--JDB