Verdict attendu en Allemagne contre trois Germano-Russes accusés d'espionnage
Un tribunal de Munich doit rendre jeudi son verdict dans le procès de trois Germano-russes, accusés d'avoir espionné pour le compte de Moscou et préparé des actes de sabotages en Allemagne visant l'aide fournie à l'Ukraine.
Depuis l'invasion à grande échelle de l'Ukraine en février 2022, Berlin est devenu à la fois le plus gros soutien européen de Kiev et une cible privilégiée d'actes de sabotage, de campagnes de désinformation, d'intimidation et d'espionnage, une "guerre hybride" attribuée au Kremlin.
La Russie dément systématiquement être derrière ces affaires et incidents.
Le principal accusé, identifié par la justice comme Dieter S., est accusé d'être une recrue d'un agent russe et d'avoir fait des repérages de cibles potentielles.
Selon le parquet, ce binational germano-russe a échangé des informations avec une personne liée aux services de renseignement russes pendant plusieurs mois, à partir d'octobre 2023, en vue d'éventuels actes de sabotage. Il aurait notamment transmis des photos et vidéos faites lors de repérages.
Accusé d'être un ancien combattant d'une milice armée séparatiste prorusse dans l'est de l'Ukraine, entre décembre 2014 et août 2016, Dieter S. se serait dit prêt, selon l'accusation, à des attentats à l'explosif et des incendies contre des infrastructures utilisées par l'armée et des sites industriels ou encore des voies ferroviaires.
- Saboter le soutien à l'Ukraine -
Parmi ses cibles, la base militaire américaine de Grafenwöhr, selon l'hebdomadaire allemand Der Spiegel, un site où sont formés des soldats ukrainiens à l'utilisation de chars américains Abrams.
Ces opérations devaient "miner le soutien militaire de l'Allemagne à l'Ukraine", selon le parquet, qui a réclamé huit ans et huit mois de prison contre le meneur présumé du groupe.
Ses deux coaccusés, Alexander J. et Alex D., également des Allemands d'origine russe qui possèdent les deux nationalités, l'ont aidé au plus tard à partir de mars 2024 dans l'espionnage des différentes cibles potentielles, selon l'accusation, qui a requis un an de prison avec sursis contre chacun des deux.
Les avocats des trois suspects ont réclamé leur acquittement.
Né en Sibérie en 1984, Dieter S. a émigré avec sa famille en Allemagne en 1998, comme des centaines de milliers de Russes aux origines allemandes, selon le quotidien allemand Süddeutsche Zeitung.
Selon le parquet, à son arrestation, il aurait demandé une visite de responsables consulaires russes.
L'Allemagne ne cesse d'alerter sur la menace croissante que représente la Russie pour elle et l'Europe.
Comme ses voisins, Berlin a dénoncé une nouvelle escalade russe ces dernières semaines, après la multiplication de vols suspects de drones au-dessus d'infrastructures, dont l'aéroport de Munich début octobre.
- "Agents jetables" -
Les autorités veulent désormais autoriser la police à abattre ou à neutraliser électroniquement ces appareils. Elles ont prévu de créer des centres pour des unités antidrones, et travaillent avec l'Ukraine et Israël, pays particulièrement expérimentés dans la lutte contre ces aéronefs.
Depuis l'invasion de février 2022, les affaires d'espionnages se sont aussi multipliées en Allemagne.
Un ancien agent secret allemand est jugé depuis plus d'un an à Berlin pour avoir transmis des informations classées secrètes aux services de sécurité russes (FSB) à l'automne 2022.
Mi-mai, trois Ukrainiens ont été interpellés en Allemagne et en Suisse, soupçonnés d'avoir été recrutés par la Russie pour commettre des actes de sabotage à l'aide de colis piégés visant le transport de marchandises.
Début septembre, le renseignement intérieur et extérieur ainsi que le contre-espionnage militaire ont lancé une campagne d'information sur les efforts de recrutement "d'agents jetables" par les services secrets russes sur les réseaux sociaux.
Selon eux, la Russie se prépare aussi à une confrontation militaire avec l'Otan dans les prochaines années.
Y. Machado--JDB